En soi le selfie, n’est pas un phénomène bien nouveau. Depuis que la photographie de loisirs existe, l’humain s’est inclus de façon plus ou moins agile dans le cadre d’une photo familiale en posant l’appareil sur pied avant un petit sprint pour rejoindre sa tribu puis en s’immobilisant, l’air faussement décontracté ! 🙂 Le selfie n’est finalement qu’une facilitation extrême du procédé d’antan : il suffit de tendre le bras, de s’inclure dans la photo, seul ou accompagné, et de choisir un arrière-plan intéressant. Bien sûr, la propension à faire du selfie a augmenté grâce à la démocratisation des voyages qui a démultiplié les situations voyageuses susceptibles de justifier un selfie, mais aussi – reconnaissons-le – par mimétisme comportemental.

Les fabricants ont emboîté le pas en faisant le maximum pour faciliter l’usage du selfie : accès immédiat à la fonction par une seule tuche externe ou sur écran, grand-angulaire, amélioration de la qualité de la caméra avant, production de perches à selfie, etc.

Alors, si le selfie est juste une évolution de nos photos familiales, pourquoi se poser des questions ?

-D’abord, le selfie n’est plus un simple amusement dans un cercle familial privé, il est sorti de ce cadre intime pour devenir omniprésent dans les lieux publics.

-Ensuite, les photos se partagent dans la seconde sur Instagram, Facebook, Snapchat ou Twitter. Ce facteur est très important, car cette instantanéité, cette coupure avec la frontière du temps et de l’espace, accentue la tendance à faire des selfies pour tout et n’importe quoi. Cette recherche de la réaction de l’autre peut pousser à des actes imbéciles comme ces attardés qui se complaisent à se prendre en selfie devant des lieux de mémoire comme le musée d’Auschwitz.

-Enfin le selfie devient à la fois la traduction d’un culte de soi et, selon les psys, d’une faille narcissique.​ Le selfie peut même tuer : chute depuis le sommet d’un pont ou d’un édifice après avoir tenté de prendre la photo la plus acrobatique, choc ferroviaire suite à un selfie sur les rails, électrocutions, noyades ou accidents de bateau en nombre. Dans le monde, Inde en tête, les décès par selfie tueraient même 5 fois plus que les requins ! 

Les dangers peuvent aussi venir d’une starisation excessive. Début 2019, l’instagrameuse taïwanaise Gigi Wu – paix à son âme – a fini par chuter d’une montagne. Elle se prenait en selfie en bikini au point culminant de plusieurs montagnes de Taiwan et diffusait ses photos sur Instagram. Les marques sponsorisaient ses « exploits » et du coup, elle était prise dans un engrenage de notoriété à tout prix. Ironie tragique de l’histoire : l’égérie d’instagram est morte de froid en raison de sa tenue légère. Triste fin. Au passage, ses milliers de fans ont pleuré des larmes de crocodiles en apprenant sa disparition alors qu’ils auraient pu réfléchir sur l’engrenage qui l’avait conduite à cette mort stupide.

Heureusement des initiatives pointent ici ou là en matière de selfies : en Inde, le gouvernement, suite à plusieurs rapports médicaux alarmants, a fini par instaurer des « zones sans selfies », notamment à Mumbai, dans 16 zones considérées à risque, près de la côte. De même, la municipalité autrichienne de Vienne a décidé d’apposer un panneau interdisant le selfie devant le plus célèbre tableau du Palais du Belvédère, le Baiser de Gustave Klimt (l’équivalent de la Joconde au Louvre). Ce ne sont là que quelques exemples, mais d’autres suivront certainement. Cela suffira-t-il ? Pas sûr…

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